Le reproche
qu'on pourrait adresser au président Hollande et à son premier ministre ne
serait-il pas de se tromper de république ? Régime présidentiel gaullien devenu
sous Mitterrand monarchie élective, la V° République s'est transformée, suite à
la réforme Jospin de 2000, en hyperprésidence assurant pour cinq ans la
toute-puissance de l'exécutif. Peut-il en effet en être autrement dans un
système où le Président quinquennal, issu du suffrage universel, bénéficie du
soutien d'une Chambre élue dans la lancée elle aussi pour cinq ans et qui lui
sera à coup sûr acquise ? Plus que jamais, le pouvoir est à l'Elysée, le
Premier ministre se trouvant réduit à n'être plus qu'une sorte de super-chef de
cabinet. L'étrange reste que ce dispositif, qui investit le Président d'un
pouvoir qu'aucun chef d'Etat français n'a connu depuis le Second Empire, ait
été conçu et mis en place par un gouvernement de gauche. Il demeure là
comme une énigme…
Cela dit, il
paraît évident qu'un tel type de gouvernement appelle un certain profil d'homme
d'état qui conjugue autorité, rapidité de décision, détermination et
pragmatisme. Nicolas Sarkozy s'y est essayé, de façon souvent trop précipitée
et quelque peu brouillonne, mais non sans résultat dans des circonstances
complexes. François Hollande, qui s'est posé comme prenant le contre-pied
absolu de son prédécesseur, semble en revanche assez souvent à contre-emploi.
Homme de négociation et de compromis qui s'est montré capable de maintenir
l'unité d'un PS déchiré par les rivalités internes, il paraît moins à l'aise
dans cette position de chef suprême qui a nécessairement le dernier mot. Sans
véritable expérience de gouvernement et brusquement projeté au sommet du
pouvoir, il temporise, biaise, crée des commissions et ouvrent des concertations
qui permettent surtout aux divers lobbies de se déployer et dont les résultats
sont parfois peu convaincants, comme on vient de le constater suite aux
discussions avec les syndicats médicaux à propos des dépassements d'honoraires.
Le Président (comme le Premier ministre) semble avoir du mal à décider lui-même
et à trancher.
Peut-être
cette carence est-elle la conséquence directe du mode de désignation du
candidat mis en œuvre en 2011 par le PS
: la primaire. Ce genre de procédure conduit presque nécessairement à promouvoir
la personnalité qui fait consensus, celle en qui les divers courants se
reconnaissent, soit (pour parler plus cruellement) celle qui dérange le moins.
François Hollande répondait assez exactement à ce portrait, celui d'un parfait
Président du Conseil de la IV° République !
Evidemment, on
constatera que ce profil est sans doute le moins adapté aux exigences de
l'hyperprésidence et des temps difficiles que nous traversons. Il est
remarquable qu'en à peine plus de six mois, la personnalité qui émerge d'un
ministère pléthorique et dont la popularité ne cesse de croître alors que celle
du Président s'affaisse est le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, dont la
résolution, la présence, l'autorité répondent à l'attente de l'opinion et
projettent dans l'inconscient collectif l'image de ce que devrait être le chef
de l'Etat dans le quinquennat tel qu'il existe.
Evidemment,
une solution serait de revenir sur ce mécanisme de l'hyperprésidence, mais peut-on
y croire quand on sait que Lionel Jospin, père de ce système, préside
précisément la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique…
Octobre 2012
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